La question du droit de suite abordée au colloque de l’ALAI

Summary
Pour une reconnaissance universelle du droit de suite pour l’artiste ?
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Le 20 mars, à l’invitation de l’Association Française pour la Protection Internationale du Droit d’Auteur (AFPIDA) et avec le soutien de la Société des Auteurs dans les Arts graphiques et plastiques (ADAGP), trois groupes d’experts internationaux se sont réunis à Paris pour discuter de la question vitale du droit de suite pour les artistes. L’évènement de la plus haute importance selon le colloque  de l’ALAI, était organisé par l’Association Littéraire et Artistique Internationale (ALAI) et accueillie par la Société des Gens de Lettres (SGDL).

Le droit de suite de l’artiste, également nommé Droit de Suite, est un droit fondamental pour les auteurs des arts graphiques et plastiques.  Il consiste en un petit pourcentage du prix de vente que des professionnels du marché de l’art paient aux artistes visuels lors de chaque revente de leurs œuvres d’art dans une vente aux enchères ou une galerie. Il garantit aux créateurs qu’ils pourront bénéficier d’une part équitable de la vente de leurs œuvres. Le tarif varie d’un pays à l’autre et dépend normalement du prix de vente de l’œuvre.

Le droit de suite est reconnu en vertu de la loi internationale sur le droit d’auteur. Ce droit figure dans l’article 14ter de la convention de Berne. Toutefois, il n’est pas obligatoire et est plutôt présenté comme un droit réciproque. Cela signifie que pour qu’un artiste reçoive le droit de suite, ce droit doit être reconnu légalement à la fois dans son pays natal et dans le pays où l’œuvre est commercialisée. 

Cet élément essentiel de la législation garantit que les créateurs bénéficient du succès de leur œuvre lorsque sa valeur augmente et une source de revenus aux artistes visuels, ce qui leur permet ainsi de continuer à créer. Cependant, même si le droit de suite existe maintenant dans environ 75 pays, il n’est toujours pas reconnu sur les deux plus grands marchés de l’art que sont les USA et la Chine.

Le professeur Pierre Sirinelli, enseignant à Université Paris 1 (Panthéon-Sorbonne) et le Président de l’AFPIDA ont présidé la première session de l’évènement. Tristan Azzi, professeur de droit à l’Université Paris 1 et Jany Jansem, galeriste (directeur de la galerie Matignon) et héritier de l’important patrimoine artistique de son père les ont rejoints.

Le professeur Azzi a rappelé à l’auditoire comment le droit de suite a vu le jour et a expliqué le rôle des institutions européennes dans son adoption légale. Il a souligné que le « droit de suite est un droit hautement adaptable ». 

A sa suite, M. Jansem a montré de quelle façon le rôle de galeristes a évolué ces dernières années lorsque le « secteur des affaires s’est emparé de l’art ». Il a également rendu hommage au travail de l’ADAGP pour faciliter la traçabilité des œuvres visuelles par le biais de sa base de données d’images.

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La deuxième session a abordé les progrès qui se dessinent en faveur d’une reconnaissance du droit de suite pour l’artiste sur les deux plus importants marchés de l’art mondiaux, la Chine et les EU. Les intervenants rejoignant le Pr. Sirinelli étaient Jane Ginsburg, Professeur de littérature et du droit de la propriété artistique à la prestigieuse université Columbia (New York) et représentant l’artiste chinois Wang Yan Cheng, la directrice générale de l’ADAGP, Marie-Anne Ferry-Fall.

« L’appel à l’équité a été entendu en Amérique «  a affirmé le Pr. Ginsburg, expliquant comment l’absence de reconnaissance du droit de suite dans la législation américaine empêche les artistes américains de bénéficier du succès de leurs œuvres lorsque celles-ci sont revendues sur le marché  international. Mme Ferry-Fall a ensuite lu une déclaration de l’artiste visuel chinois, Wang Yan Cheng, dans laquelle il souligne la formidable croissance du marché de l’art chinois, dynamisé par la croissance économique du pays. « Le marché de l’art était encore inexistant il y a 10 ans » indique-t-il. « Aujourd’hui, il est aussi conséquent que celui du RU ».

Il a également expliqué que les artistes chinois attendent avec enthousiasme l’adoption du droit de suite dans la législation chinoise sur la PI.

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Pour la dernière session, Mme Ferry-Fall a été rejointe par M. Abdul Aziz Dieng, premier Conseiller auprès du Ministre de la Culture du Sénégal et représentant du Sénégal à l’OMPI et par Sam Ricketson, Professeur en Droit de la propriété intellectuelle de la faculté de droit de Melbourne. M. Dieng a expliqué la position du Sénégal, fer de lance de la promotion du droit de suite des artistes à l’OMPI et défenseur de son adoption universelle. Il a également annoncé son intention de s’entretenir avec tous les Ministres de la Culture et Ministres de la Propriété intellectuelle lors d’une réunion extraordinaire de l’OMPI en novembre.

Le Professeur Ricketson a informé l’auditoire qu’au cours des 10 à 15 dernières années, un nombre croissant de pays avait inscrit dans leur législation le droit de suite pour les artistes. Selon lui, « Ce droit fait de plus en plus d’émules parmi les pays de la Convention de Bernes ».

L’évènement s’est terminé par un débat animé sur les sujets soulevés pendant la journée et les  principales organisations se sont engagées à poursuivre leurs activités de sensibilisation à ce droit essentiel qui commence à faire son chemin dans les législations de nombreux pays dans le sens de son adoption universelle.

Pour plus d’informations sur le droit de suite et pour comprendre ce qu’il signifie pour les artistes visuels, lire leurs témoignages dans la Brochure sur le Droit de Suite des Artistes.