Une table ronde de créateurs et la question de l’IA attirent les sociétés d’art visuel à Paris pour le congrès du CIAGP
L’émergence rapide de l’IA générative a radicalement modifié le paysage des arts visuels depuis un an. Bien que, selon le Rapport sur les collectes mondiales 2023 de la CISAC, ce secteur ait vu ses collectes augmenter d’un tiers par rapport aux niveaux pré-pandémie, les plateformes d’IA opèrent sans licence et exploitent des œuvres de créateurs humains protégées par le droit d’auteur sans leur accord, sans les rémunérer et sans aucune transparence.
Cette situation nouvelle, les efforts déployés pour faire du droit de suite un droit universel et une table ronde d’artistes visuels ont réuni les sociétés d’arts visuels à Paris pour le congrès 2023 du CIAGP.
Organisé les 27 et 28 novembre, ce premier congrès en présentiel depuis la pandémie a été ouvert par Kader Attia, Président du CIAGP, qui a souhaité la bienvenue aux représentants des sociétés d’arts visuels avant le discours du Directeur Général de la CISAC.
Gadi Oron a souhaité la bienvenue au nouveau Président Attia et à la nouvelle Rapporteuse du CIAGP Marie-Anne Ferry-Fall avant de remercier le précédent Rapporteur, Javier Gutiérrez, pour son engagement, son dévouement et son action décisive. Gadi Oron a déclaré aux délégués présents qu’avec des collectes liées aux arts visuels en hausse de 12,8 % en 2022 pour atteindre 220 millions d’euros, « nous pouvons enfin dire que la pandémie est derrière nous ».
Néanmoins, la part des collectes générées par les exploitations en ligne reste faible, à seulement 7 %. Les revenus du numérique pour les créateurs visuels doit augmenter, a-t-il affirmé.
En ce qui concerne l’IA, Gadi Oron a réaffirmé qu’elle changerait la façon dont les œuvres sont créées, aurait des conséquences sur les créateurs humains et bouleverserait le fonctionnement des industries créatives et culturelles. Les générateurs d’images et les outils d’IA générative sont déjà entraînés aujourd’hui en utilisant des œuvres existantes, souvent protégées par le droit d’auteur, sans l’accord de l’artiste.
« Nous savons que des noms précis d’artistes peuvent être entrés comme mots clés dans ces outils pour créer une image qui copie le style de l’artiste. » De manière inquiétante, aucune plateforme ne verse pour cela le moindre centime. Gadi Oron a appelé à agir rapidement pour s’assurer que les services d’IA versent des droits d’auteur quand ils utilisent des œuvres protégées pour cette forme d’« entraînement ».
Campagne pour le droit de suite
Les dernières initiatives pour défendre l’adoption universelle du droit de suite et les différentes campagnes nationales ont ensuite été présentées. En Nouvelle-Zélande, par exemple, le droit de suite a été adopté et intégré dans les Accords de libre-échange avec l’UE et le Royaume-Uni. La CISAC mène actuellement des actions de lobbying pour garantir sa bonne mise en œuvre en droit national. L’Assemblée nationale sud-coréenne a également adopté le droit de suite en juillet et la CISAC aide la SACKS, sa société membre locale, à garantir sa bonne mise en œuvre. La CISAC soutient en outre une campagne pour l’adoption de ce droit au Canada. À l’échelle internationale, dans le cadre de l’OMPI, la CISAC et le Professeur Sam Ricketson travaillent sur un guide pratique reprenant les meilleures pratiques d’administration du droit de suite. Ce guide sera présenté lors de la prochaine session du SCCR d’avril 2024, ce qui sera un plus pour les discussions au sein du Comité.
Panel de créateurs
Lors d’une première intervention des artistes au congrès, une grande table ronde réunissant des artistes du Canada, de France, d’Allemagne, du Mexique, du Sénégal et d’Espagne s’est intéressée aux difficultés de faire carrière en tant qu’artiste visuel dans le marché actuel. Les artistes visuels Yancouba Badji, Paddy Lamb et Esther Pizarro, et le photographe Matthieu Baudeau, ont partagé leur expérience par rapport au droit d’auteur et à la façon dont l’économie de la production et de la distribution artistiques a changé avec l’arrivée d’Internet et de la technologie numérique. L’artiste visuelle Elizabeth Ambriz, l’illustrateur de bandes dessinées Denis Bajram et le photographe Armin Smailovic ont parlé des opportunités et des problèmes que l’IA représente pour les artistes.
Les débats d’experts du congrès du CIAGP se sont également penchés sur les moyens de renforcer la coopération entre OGC. Le CIAGP réunit plus de cinquante sociétés à travers le monde par le biais d’accords de représentation. Cependant, les contextes économiques et législatifs différents dans lesquels elles exercent leurs activités exigent des améliorations constantes et une bonne coopération entre ces sociétés. Sur le sujet de l’IA, une table ronde consacrée à l’impact de l’IA sur les OGC et les artistes s’est interrogée sur le moyen de concilier le développement de cette technologie et le respect du droit d’auteur.
Résolutions
Le CIAGP a approuvé deux résolutions : l’une sur la nécessité de continuer à protéger les droits des artistes visuels à l’ère de l’IA et l’autre pour soutenir l’adoption du droit de suite au Canada.